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Chronique Antonienne

Découvrez au fil du temps l'Histoire de vos ancêtres racontée par Monsieur JALLERAT Robert passionné par la vie D'Antoigné

Histoire d'ANTOIGNE

 

Introduction

            Je suis de la Région Poitou-Charentes. C'est ma région, celle que j'aime !

             Mais, je me sens avant tout Poitevin, Poitevin d'adoption, certes, mais si attaché à cette région qu'il n'est plus question, pour moi, de me retirer ailleurs, d'encourager une équipe sportive qui ne soit pas du Poitou ! Le Poitou ? Voyons ce qu'en disait Jules Michelet, dans son "tableau de la France" que même ses admirateurs considèrent comme une erreur, un faux pas de l'historien dans la poésie : 

" Le Poitou est la bataille du Midi et du Nord. C'est près de Poitiers que Clovis a défait les Goths, que Charles Martel a repoussé les Sarrasins, que l'armée anglo-gasconne du prince Noir a pris le roi Jean.  Mêlé de droit romain et de droit coutumier, donnant ses légistes au Nord, ses troubadours au Midi, le Poitou est lui-même comme sa Mélusine, assemblage de natures diverses, moitié femme et moitié serpent. C'est dans le pays du mélange, dans le pays des mulets et des vipères, que ce mythe étrange a dû naître. …L'aurore de la poésie moderne y parut au XIIème siècle ; Guillaume VII est le premier troubadour. Ce Guillaume, excommunié pour avoir enlevé la vicomtesse de Châtellerault, conduisit, dit-on, cent-mille hommes à la terre sainte…"

Est-ce bien ce Poitou que nous aimons ?

Mais,   je ne suis pas de Poitiers ! C'est Châtellerault que j'aime. Rien ne vaut à mes yeux Châtellerault !  Châtellerault qui, justement, tourne le dos à Poitiers et regarde vers l’Ile de France ; Châtellerault, à peine poitevin, dont les environs sont si reposants au regard, si calmes, si emprunts de paix et de tranquillité ; Châtellerault si bien accroché à sa rivière, sa Vienne, avec son pont Henri IV, ses jolies maisons en pierres de taille ; Regardez donc ces prairies tendres et alanguies épousant les contours de collines douces où le vert triomphe gentiment de l’or des blés et du maïs, trois saisons sur quatre. Comment ne pas admirer le travail de nos ancêtres paysans qui ont su apprivoiser la nature, en l'aimant et en la respectant, en lui soustrayant les rocs abrupts,  pour lui confier leurs champs si joliment ourlés…

Roffay des Pallus, historien châtelleraudais du 18ème siècle, en a si bien parlé : ".. l'on marche toujours dans une plaine étendue et bornée à droite et à gauche de très beaux "cotteaux" chargés de vignes, d'arbres fruitiers et de bois futais. .L'air y est très sain et très vif. Ses "coteaux" se coupant en différents endroits, donnent des échappées de vues magnifiques."

Voilà donc le moment d’évoquer cette phrase de Fernand Braudel " il n'y pas une France une, mais des Frances….pas une Bretagne mais des Bretagnes…des Lorraines, des Franches-Comtés, des Alsaces…"... Et aussi, naturellement, des Poitous ! Des Poitous, qui aux yeux de chacun des habitants de cette région ne font qu'un, constitué de plusieurs villes ou villages, toutes et tous en concurrence entre elles et eux !

Et voilà ! Il en faut peu pour que ce chauvinisme, ce patriotisme exclamé se hurle pour un quartier comme celui d'Antoigné, qui fut, jadis, un village indépendant  ! Après tout, on a bien le droit d'aimer l'immeuble à dix ou vingt étages qui nous héberge tout en jurant que rien ne vaut l'étage où l'on a son logis!  Ô, Antoigné, tu es mon étage !

*    *    *

Un jour, des habitants du quartier d'Antoigné se réunirent et eurent envie de se regrouper, se retrouver entre habitants du même coin, tenter de savoir qui ils étaient, d'où ils venaient, quel avenir ils avaient.

 Ils eurent tôt fait, alors de créer une association qu'ils appelèrent :  "Demain Antoigné" poussés qu'ils étaient par leur désir d'avenir et non par leur passé !

L'enthousiasme les gagna vite : "Demain, on fera des choses formidables ensemble ! On va s'entraider, développer notre quartier, prendre une place de plus en plus grande au sein de la commune et, surtout, venir en aide à tous ceux qui, chez-nous, à Antoigné, en ont besoin !"

Mais quand on parle de demain, on ne peut guère s'empêcher de penser à hier et, très vite, l'association voulut qu'on sache l'histoire d'Antoigné.

Tel est le but de cet essai. Il faut donc dire comment était hier. Encore faut-il trouver des anciens qui aient envie de vous dire ce dont ils se souviennent. Or, il se trouve que les habitants d'Antoigné n'aiment pas passer pour des vaniteux.  En conséquence, ils rechignent à parler de ce qu'ils ont connu. Eh ! oui ! Évoquer ses souvenirs et parler du temps où ils étaient à l'école, par exemple, les conduiraient à parler de leur rang : étaient-ils bons élèves ?,,,,,,, Aussitôt les voilà qui ferment la porte car il n'est pas question pour eux de se vanter de quoi que ce soit.

Voilà pourquoi les quelques personnes qui ont bien voulu me confier leurs souvenirs l'ont fait sous un nom d'emprunt.

Mais pour parler d'avant-hier, encore faut-il trouver des archives. Or, elles manquent cruellement pour Antoigné !

Figurez-vous que la paroisse d'Antoigné, qui eut l'honneur, sous la révolution, de devenir une commune, fut rattachée à Châtellerault en 1801, sur ordre du Premier Consul Napoléon Bonaparte. Alors, imaginez le responsable de cette commune qui perdait son autonomie : c’est le le maire : il se rend à Châtellerault avec, sous le bras, un dossier comportant l'ensemble des archives de la dite commune.  Eh ! Bien !  À Châtellerault, on ne sait pas où ce dossier est passé !

les Archives d'Antoigné  ont disparu !

Après tout, cela devrait faciliter la tâche de l'apprenti historien : il lui suffit d'inventer ! Je m'y suis employé aussi souvent que possible. Ceux qui prendront la peine de lire cet essai[1] ne manqueront pas de le constater : je me contenterai, la plupart du temps, de reprendre, sans rien y ajouter, les « chroniques antoniennes » éditées en accompagnement de La gazette de  « Demain Antoigné »,  

1 –  UN NOM.

Une première question apparaît : de quand date ce nom d'Antoigné ?

On sait, grâce aux toponymistes – Pierre-Henri Billy, entre autres - que le nom de notre Antoigné est composé d’un nom de personne (Antonius) suivi d’un suffixe signifiant «lieu de.. »  parce que la personne désignée était propriétaire du lieu.

Le suffixe le plus courant est le gallo-romain « acum », le plus utilisé du II° au IV° siècle qui s’est prononcé et écrit, suivant les régions, suivant la langue parlée (Oc ou Oil), de différentes manières. Il est ainsi devenu :

 - « ac »( Moissac , Aurillac, Soulac…) 

-  « at » ( Sarlat, Murat…)

- « ay » (Epernay, Bernay) ..–

- «eu »  ou « eux » ou « yeux » (Lisieux, Bayeux..)

-« y » (Passy, Nancy..)

Ou, encore : « é » comme pour Segré, Vitré et…Antoigné. Antoigné désignait donc, initialement, un domaine appartenant à un certain « Antonius ».

Qui était cet Antonius ? nous n’arriverons probablement pas à le découvrir. Etait-ce un gallo-romain ? un romain ? Etait-il parent avec l’Antoine de Cléopatre ? Ce n’est pas impossible : on sait que les familles romaines étaient très unies et très étendues[2].]

Cette signification toute simple n’a pas empêché les scribes de toutes époques – généralement des moines – d’infliger quelques tortures au nom de notre village, dont existence n’était relevée qu’à raison des bénéfices et dîmes qui en étaient attendus.

Les plumes d’oie servant à l’élaboration des "cartulaires", "pouillés" et autres registres ecclésiastiques dérapaient parfois et donnaient à notre village une orthographe assez changeante : En compulsant les archives historiques du Poitou, il apparaît que le premier document parlant d’Antoigné est le cartulaire de l’abbaye de Saint Cyprien de Poitiers, datant de 1097. On y apprend que cette abbaye possède, dans (ou près de) « Castel Airaudum » (c'est-à-dire Châtellerault) ; les églises de Saint Romain, Saint-Jean Baptiste, et Sainte Marie de « Potumiaco ». Ce texte précise en outre que ces églises sont sous la juridiction de Saint Romain. N’y a-t-il rien d’oublié dans ce cartulaire ? N’oublierait-on pas une église ? Voilà donc que le texte ajoute, in fine : « et ecclesiam de Antoignec », mais sans préciser à quelle juridiction cette  église est soumise !  !

 Faut-il conclure, à la lecture de ce document – évidemment rédigé en latin  du 11ème  siècle – que l’église d’Antoigné (écclesia de Antoignec) ne relève pas de la juridiction de Saint Romain, a un statut à part ? cela paraît peu probable. Retenons simplement que la présence d’une église implique naturellement la présence d’une population suffisante qui confère à l’agglomération le statut de village, et non celui de hameau. Mais retenons son nom de « Antoignec »

En l’an 1119, on parle de l’ ecclésia de «  Antoniaco », terme remplacé en 1349 par « Anthognéyo », lequel est à son tour remplacé, un siècle plus tard (1467) par « Anthogny », chez les moines de Saint Cyprien.

Pourtant, à la même époque (1470), à la cure du village, on écrit « Anthoigné ». Le h en plus disparaîtra dans le pouillé du diocèse de Poitiers de 1782. L’orthographe du nom de notre village est-elle enfin stabilisée ? Pas encore puisqu’en 1881, le dictionnaire topographique de la Vienne l’écrira : « Antogné » ! Et c'est encore l'orthographe que le service des Archives Départementales a retenu pour son si précieux site informatique !          

Il reste qu'à Châtellerault même, on connaît l’orthographe actuelle de notre village – Antoigné -  depuis….1380 !

Ouf !

2 - L’OUBLIE

Il y a à Châtellerault, au creux de la colline qui borde la ville à l’est, caché dans le vert, un ancien village, nommé Antoigné. Si l'on compare cette partie du châtelleraudais à la paume d'une main ouverte au ciel ("pour que l'oiseau du large y vienne et s'y confie", dirait Aragon), il nous semble voir notre village au creux de cette paume, tandis que les doigts tendus vers l'est représente ses chemins montant vers la Tour Girard, la Guillotière, le portail rouge.

Village curieux, dont la topographie souligne les anomalies, où les rues gardent leur nom de « chemins ».On trouve ainsi le chemin du Portail rouge,, le chemin de la bicoque, le chemin du Verger, etc ( le plan ci-joint en donne le détail-.Remarquons cependant que le chemin qui desservait les mines qui ont fait la notoriété  d’ Antoigné porte le nom de « Rue de la Guillottière»

[3]Pauvre village, devenu, depuis plus de deux siècles, un simple quartier de la ville !Pauvre village toujours oublié, toujours négligé par la cité dont il relève, et ce, depuis les débuts !.:

 1 )– Prenez   le cartulaire de 1097 par lequel Pierre II, évêque de Poitiers, confirme le rattachement à l’abbaye Saint Cyprien de Poitiers des églises du diocèse, notamment celles situées près ou à l’intérieur de Châtellerault : il cite l’église Saint-Romain, l’église Saint-Jean-Baptiste,.. l’église Sainte Marie de Pouthumé, en précisant qu’elles relèvent de Saint Romain. L’inventaire est-il complet ? peut-être pas, puisque le rédacteur ajoute « in fine » ces mots : « et  ecclesia de Antognec »

Se peut-il que cette église d’Antoigné n’ait pas de nom ? N’aurait-elle pas été, dès le début, consacrée à Saint Pierre ?  Se peut-il qu’elle n’ait pas relevé, comme les autres, de la juridiction de Saint Romain ?  Pourquoi est-elle à part ? A-t’elle été omise dans la liste initiale ? Se pourrait-il que sa construction soit légèrement ultérieure à la rédaction de ce document,  ce qui a imposé le rajout dont elle fait l’objet ?

2 – A la révolution, le statut de commune fut conféré à toutes les paroisses. Cette décision fut  prise dès décembre 1789 - notamment sous l’impulsion de Mirabeau - et tout fut mis en œuvre pour que la mesure prenne effet le plus tôt possible. Dès Janvier 1790, les citoyens d'Antoigné - plus exactement ceux acquittant un impôt représentant 3 jours de salaire – furent  donc invités à élire leur maire.

   Antoigné  élit  son maire. C’est Jean Thénault.

 Evidemment,  ce maire, se conformant aux directives du Code municipal édité à l’initiative de  la constituante de 1789, a tenu un registre des délibérations du conseil municipal.  

Ce registre  a disparu !

      La commune d’Antoigné, activée par les élections de janvier 1790, fut supprimée et rattachée à Chatellerault, à compter du 18 novembre 1801, en application de  la loi du 8 pluviose an IX. Si l’on consulte le registre des délibérations du conseil municipal de Châtellerault, on passe du 18 fructidor an IX (6 septembre 1801) au 29 nivose an X (20 janvier 1802) :

Rien à la date du 18 novembre 1801 !

3 – en plein XIXème siècle, l’abbé Lalanne, dans son « histoire de Châtelleraud et du Chatelleraudais », évoquant le peuplement de la contrée à l’époque gallo-romaine, cite vingt-six villae dont le nom est à l’origine du nom de nos actuels bourgs et villages.

Il y manque la villa Antonii !

4 - En 1902, un plan de Châtellerault est établi : sur ce plan, le chemin du Roc s’appelle : " chemin de grande communication de Châtellerault à Antoigné et  Oyré ". il semble bien que ce soit la seule voie comportant, dans Châtellerault, une telle appellation : on chercherait en vain la " rue de Châtellerault à Châteauneuf" ou de Châtellerault à Pouthumé"..*

Ce plan ne va pas au delà du Verger et de la Grisonnière.

5 - En 1930, un nouveau plan est réalisé : le chemin du Roc s’appelle « Chemin de Châtellerault à Oyré » et la rue de la grand Eau, qui, dans le plan de 1902,  s'appelait « chemin vicinal ordinaire de Châtellerault à la Tour Girard », est devenu « chemin vicinal ordinaire de Châtellerault à la Grisonnière ».Ce plan ne va pas au delà du Verger et de la Grisonnière

Antoigné ne figure pas dans le plan de Châtelleraul, qui devrait, pourtant, concerner toute la ville

6 – Dans le remarquable « Châtellerault d’hier à aujourd’hui », madame Yvette Maréchal nous indique que le pont henri IV fut construit avec des pierres provenant de la carrière, ouverte dans ce but dans la forêt de Moulière.. Il n’est signalé aucune autre carrière. Pourtant, Androuet du Cerceau, dans un rapport de 1611, parle du … « bourg dudict Antougné, où on tire la pierre tendre pour bastir, de laquelle a esté basty le pont, tours et portaux, dudict Châtellerault, lequel lieu d’Antougné est distant de lad. Ville de viron ung grand quart de lieue… ».

7 - Dans l’ouvrage précité, madame Maréchal rappelle qu’Androuet du Cerceau, dans son rapport de 1611, a « trouvé les ruhes dudict Châtellerault assez bien pavées ». Mais il est fait abstraction de ce que ce même rapport dit du chemin menant à Antoigné qu’il juge « fort mauvais, estans terres fortes, enfondrantes, où les charroix entrent en pleusieurs lieux jusques à l’essieuil … ».

8– si l’on se réfère au très complet et très documenté « Châtellerault sous l’occupation » de Madame Marie-Claude Albert, il y a lieu de penser qu’Antoigné est resté étranger aux événements qui ont marqué localement la deuxième guerre mondiale : Il ne s’y est rien passé !

Il semblerait, pourtant :

- qu’un régiment d’infanterie, en partance vers la frontière pendant la « drôle de guerre » s’y serait arrêté,

-  que l’école ait été réquisitionnée pour l’hébergement de réfugiés,

-  que les Allemands aient su utiliser les grottes antoniennes comme dépôts d’armes ,

- que de nombreux Chàtelleraudais aient aussi songé à venir s’y réfugier lors des bombardements…

(Il faut dire que le plan de la ville de Châtellerault en 1941, qui servit à l’’établissement des cartes figurant dans l’ouvrage, s’arrête  au Verger.  Antoigné, qui fait partie de la ville depuis 1801, ne figure pas dans ce plan émanant de la municipalité !)

9 -  Dans sa « petite histoire de Châtellerault », Monsieur Gwenaël Murphy  nous indique que Jean d’Harcourt, au 14ème siècle, fait renforcer le réseau des tours fortifiées, à savoir, Oyré, Asnières, Pouillé, Naintré, Beaumont, Sossay, Savary, Scorbé.

- Saura-t-on jamais à quoi servait la Tour Girard ? Mais il est logique qu’il n’en soit pas question, puisque le « Plan de Châtellerault au début du XXI° siècle » reproduit dans cet ouvrage, s’arrête toujours au Verger !

Qu’on ne s’étonne donc pas si ce rejet constant, ce refus permanent d’admettre l’existence d’un  village - de tout temps accroché à Châtellerault, au point d’en être devenu un simple morceau –  et de lui faire une petite place, se retrouve dans le comportement des autorités

            C’est ainsi qu’on oublie d’intégrer Antoigné dans les plans de la ville !

Et voilà, peut-être, pourquoi on rechigne à lui donner accès aux avantages dont bénéficient les autres quartiers 

Pauvre village ! Faut-il considérer qu’Antoigné ne mérite guère plus d’attention et doit, selon le mot d’Apollinaire, s’endormir dans le brouillard « Qui cache les hameaux pauvres et vergogneux » - ?

Ne faut-il pas, au contraire, conclure de ces constatations que notre village s’est, pendant longtemps efforcé de passer inaperçu, mettant ainsi en application le principe selon lequel les peuples heureux n’ont pas d’histoire ?

Au reste, ne serait-ce pas un comportement habituel des Poitevins, qui cherchent surtout à ne pas paraître ?  Les autres provinces de France ne cherchent qu’à se mettre en valeur, se réjouissent de voir des poètes en parler avec l’amour et l’enthousiasme dont ils sont capables et chanter leur  « beau pays ».  le Poitou, au contraire ne pense qu’à se taire !

L’idéal serait-il, pour lui, de n’avoir pas d’histoire ?……. ni de géographie….     .    .

Il nous reste, cependant à chercher des repaires dans le passé. En voici quelques uns que j’ai reproduits en veillant à respecter l’orthographe des citations moyenâgeuses.

[1] Ils  seront probablement peu nombteux !

[2] On a même vu, un jour, alors que Rome était en guerre contre beaucoup de ses voisins, un chef de famille romain – le « pater familias » tout puissant – se présenter au forum et annoncer que sa famille s’occuperait seule de la lutte contre la cité étrusque de Veies. Mal lui en prit d’ailleurs car tous les hommes de la famille furent massacrés par les Veiens, à l’exception d’un seul, trop jeune encore pour prendre les armes ! le nom de cette famille ? FABIUS ! !

[3] Est-ce par référence à la « Guillotière «, quartier ancien et populeux de Lyon, que ce nom lui fur donné ?

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Chronique Antonienne

Un Séquoia ( mult ) séculaire

" Il date de Henri IV !"
"C'est François premier qui a ordonné qu'on le plante là !"
Autant d'affirmations catégoriques, à propos de ce beau séquoia qui orne magnifiquement notre palce de l'église "place Jean Thénault", affirmations qui témoignent surtout du désir des Antoniens de connaître le passé de leur village et, tant qu'à faire, le plus prestigieux possible. Mais qu'y-a-t-il de vrai dans tout cela ? Notre séquoia a-t-il vraiment plus de deux siècles ?
Tenter de retracer la vrai histoire de notre séquoia, c'est certainement s'exposer à quelques désillusions!
le séquoia est certes, un arbre très ancien, mais on sait qu'il disparut d'Europe lors des grandes glaciations du début de l'ère quaternaire et s'est depuis, confiné en Californie. On ne pouvait donc pas le connaître en Europe avant qu'on ait découvert la Californie !
La première description de cet arbre date de 1833, mais ce n'est qu'à partir de 1850 que l'Europe commence à s'y intéresser : un arbre géant pouvant atteindre une circonférence phénoménale, voilà qui peut exciter la curiosité des scintifiques ! Voilà qui excite aussi l'appétit des forestiers qui se précipitent pour abattre ces géants auxquels on a donné (entre autres) le nom du chef indien Sequoyah. Les plus gros de ces arbres sont alors abattus à l'explosif, ce qui entraîne la réaction des autorités américaines qui décident la création des parcs nationaux pour sauver leurs forêts de séquoias !
Nous sommes donc bien obligés d'admettre que notre séquoia ne peut pas être antérieur à 1850. la mode de planter un séquoia lors de cérémonies officielles s'est alors très vite répandue : un arbre dont on ne connaît pas la durée de vie, qui est en croissance permanente est tout désigné pour exprimer l'éternité des sentiments que les édiles nourissent envers, telle valeur, tel principe, tel gouvernant, voire tel fils d'Empereur ! On sait ainsi qu'à la naissance, en 1856, du Prince Eugène-Louis Napoléon, fils de Napoléon III (celui qui fut tué par les Zoulous en 1879) fut l'occasion de planter bien des séquoias. La ville de Chatellerault a-t-elle cédé à la mode? Rien de tel ne figure dans le registre des délibérationsdu conseil municipal, qui, pourtant, fait état des manifestations qui ont salué cette naissance. Rien non plus en 1889, pour le centenaire de la Révolution!
Comment se fait-il que la municipalité ne fournisse aucune précision sur la date de plantation de cet arbre ?
Un début de réponse nous est donné sur le plan du cadastre Napoléonien, mis à jour en 1833 : à l'époque, le terrain sur lequel se trouve le séquoia n'appartient pas à la ville, mais fait partie du presbytère ! Ce plan fait état de plusieurs constructions et d'un vivier mais ne mentionne pas la présence des arbres.
L'affaire prend une nouvelle tournure en 1913 : la vile, qui cherche depuis quelque temps à aménager l'angle de la route d'Antoigné et de la route de la Bobinière (c'est à dire aujourd'hui, le chemin du portail rouge et le chemin de la bicoque d'Antoigné) accueille la suggestion de Mr PARIS qui propose de prolonger la petite place de l'église jusqu'à la route de la Bobinière.
La commission des travaux s'étant rendue sur place, eut tôt fait de trouver cette proposition très avantageuse, puisqu'elle permettait "non seulement l'élargissement du tournant, mais aussi l'embellissementdu bourg". La commission joint à son procès verbal d'expertise du 18 mars 1914 un plan détaillé de la surface à acquérir par la mairie. On y relève la présence du vivier... Mais où diable est donc notre séquoia ?????
Comme il est guère problable qu'il ait été planté après 1914, il se peut que sa présence sur le "terrain à aliéner" n'ait pas attiré l'attention de la commission en raison de sa taille encore modeste !!!
l y a pourtant quelqu'un qui est fortement opposé à ce projet, c'est l'abbé HILAIRET, curé d'Antoigné : il multiplie en vain, les démarches en vue d'empêcher la réduction du presbytère. C'est ainsi que, dans une de ses lettres adressées au maire le 19 juillet 1913, on relève la phrase suivante :
"cette nouvelle délimitation gâterait entièrement ma cour d'entrée et m'enlèverait : un volière adhérente au mur et construite à mes frais ; une haie de grands lauriers que j'ai plantés il y a dix ans ; un grand nombre d'arbres, dont trois conifères magnifiques, qui font de l'enclos le plus bel ornement".
Quel dommage que le père HILAIRET ne nous ait pas fourni plus de précisions sur la date de plantation de ces trois magnifiques conifères, dont il y a tout lieu de penser que le séquoia fait partie !
L'incertitude demeure ! il reste une opération à laquelle nous nous sommes livrés à plusieurs, avec cependant quelques réticences en raison de notre inexpérience :
Frappé par la foudre, notre séquoia a dû être étêté en 2004 : grâce à notre association, la partie coupée du tronc a été récupérée et débitée en tronçons. Les anneaux de croissance qu'on a pu déceler sur un de ces tronçons, avec les difficultés que l'on imagine, permettent une nouvelle approche : nous avons trouvé 99 anneaux, puis 102, puis 1004 ...
Cent quatre anneaux ? 2004 moins 104 ? se pourrait-il que notre séquoia ait été planté pour célébrer l'entrée dans le vingtième siècle ?
Et pourquoi pas ???

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Chronique Antonnienne

 Antoigné Paysan ?

Pourquoi le cacher? Je ne sais pas faire dans l'interview. Il me suffit de regarder mon interlocuteur pour que je perde tout souci de transcription  de ses propos. Je vis ce qu'il me raconte! Et j'oublie de l'écrire!

          Imaginez ce que j'ai pu ressentir en allant, de temps en temps, recueillir les souvenirs de nos anciens Antoniens: il se dégageait d'eux une telle chaleur, une telle amitié qu'il n'était plus question pour moi d'écrire sous leur dictée ; il me fallait faire confiance à ma  mémoire. De grâce, ne m'en veuillez pas si je ne suis parfois qu'approximatif. Mais mettez –vous à ma place:

          Imaginez à présent  que la personne qui, sous le nom de "la petite Andrée", a bien voulu nous faire part de ses souvenirs  des années quarante, veuille à présent évoquer  notre Antoigné, dans ce moment très particulier que fut la seconde guerre mondiale. . Elle, elle est du village, c'est-à-dire de la Guillotière, et non du bourg, c'est-à-dire de l'Eglise, distinction qui dénote l'appartenance de l'Antoigné de ce temps au monde paysan. Mais qu'on soit du bourg ou du village, on se connaît tous : le dimanche, après la messe, ces dames, qui ont mis leurs plus belles toilettes, se rencontrent, se saluent, se congratulent  échangent de ces  propos aimables qui permettent de savoir ce qui se passe dans tous les coins du village. En face de l'église, le cabaret accueille  messieurs les cultivateurs toujours prêts à trinquer sur l'anticléricalisme  qui les habite depuis 1905.

          Comme elle n'a jamais bougé d'ici, évidemment, la "Petite Andrée" connaît tout le monde!

          Mais il ne s'agit pas, ici, pour elle, d'évoquer des souvenirs personnels, mais de donner une idée de l'état général du village.

          Elle se prend au jeu et commence sur un ton qui sent le rigide, la personne soucieuse de ne rien oublier, de  dire dans l'ordre des choses précises ( dont j'oublierai une grande partie!). Nous passons en revue  tous les lieux dits qui semblent devoir leur nom au fait qu'ils sont l'emplacement soit d'une ferme, soit d'une maison bourgeoise doublée d'une ferme. Le propriétaire de la ferme cultive du blé ou de l'orge, il a un petit troupeau et une basse cour.et un peu de vigne. Ses enfants l'aident; il sait, tout faire: aussi bien lisser une chape de ciment que réparer un tracteur ou gerber les blés. Il sait qu'au moment de la récolte, il pourra emprunter la moissonneuse-batteuse du voisin, faire appel aux paysans voisins qu'il saura aider quand ils en auront besoin. Et voilà classés comme fermes "la Girouette, les Chaumes, les trois Cheminées, le Moulin à Vent, les Peupliers, la Durauderie, la Guillemetrie, la Grisonnière et tant d'autres. La ferme du Verger est tenue par le père d'une personne que l'association a honorée en la nommant Antoinette, il y a un ou deux ans.. Il y a deux fermes à la Tour Girard: celle de Monsieur Chrétien et celle de Monsieur Pacaud..

          Mais l'évocation de ce dernier nom, rappelle un souvenir et le visage de la petite Andrée s'éclaire soudain d'un sourire: elle va raconter:

"En ce temps('début du siècle) mon père "tirait" de la pierre d'Antoigné qu'il allait livrer, avec son cheval et son tombereau, à Port de Piles. Voilà qu'après sa livraison le maçon qu'il avait livré lui verse un petit coup de vin. "Ma foi, s'exclame-t-il, voilà un vin qui a bon goût!" "vous le connaissez bien lui répond-on, il est d'Antoigné. Mon père pense alors à la vigne à Pacaud qui est la seule conséquente, au point qu'on met quinze jours à la vendanger à quinze! Mais on lui donne un autre nom! "je comprends tout! dit-il, c'est le vin fabriqué  par celui qui vendange la nuit la vigne des copains!!! En effet, chaque propriétaire d'un terrain, veillant à l'époque à retirer de sa terre tout ce qu'il lui fallait pour vivre, cultivait un peu de vigne, juste de quoi satisfaire ses besoins personnels en vin! Or, plusieurs d'entre eux avaient constaté la disparition de  grappes de leur vigne, les plus belles évidemment, et s'en étonnaient! Et voilà que le coupable était  désigné par un habitant de Port de Piles!"

 

       Ainsi, Antoigné, au milieu du vingtième siècle, est encore un village, où les habitudes, les façons de vivre sont typiques du monde paysan. Bien sûr, on devait sentir venir le moment où la ville qui a absorbé administrativement le village finirait par l'intégrer économiquement : les ouvriers de la MACC, puis des Fonderies du Poitou,  vivant à Antoigné, seraient de plus en plus nombreux. Bientôt, notre village acquerrait  le statut particulier de  lieu résidentiel! Peu à peu, on a remplacé les champs de blé ou d'avoine et les prairies par des villas, du gazon et des piscines. Doit-on en conclure qu'on ne se connaît plus?  Ne sait-on plus ce que notre voisin attend de nous?

Heureusement, Demain Antoigné est là pour nous aider à vivre ensemble !

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Chronique Antonienne

Antoigné et le froid

    Emmanuel Le Roy Ladurie, dans  son "Histoire humaine et comparée du climat" évoque notamment le petit âge glaciaire qu'a connu la planète  du XII ° au XVIII° siècle. Trois dates sont à retenir plus particulièrement:

1) 1693/94     Un temps exécrable, trop humide en été, trop froid et neigeux en hiver,  est assurément la cause de la famine qui s'abattit sur la France en 1693-1694 et qui semble avoir causé pas moins de 1.300.000 morts. Quasiment autant, en deux ans, que la première guerre mondiale en quatre ans!

       Antoigné, notre village fut-il épargné? Il faut croire que non, car le registre de l'Etat civil fait état d'un nombre exagéré de décès pour la période considérée. Les chiffres suivants en donnent la confirmation:

               nombre total d'actes 

Année 1691 Année  16 Nombre de décès 12
Année 1692    Enregistrés 26   Enregistrés  12
Année 1693  Enregistrés 51  Nombre de décès 31
Année 1694  Enregistrés 37   Nombre de décès 31
Année 1695  Enregistrés 27   Nombre de décès 

 Pour la seule période allant du 15 septembre 1693 au 1er mars 1694, on compte pas moins de54 décès pour deux baptêmes et un mariage (Remarquons cependant que le nombre des mariages célébrés à Antoigné reste, dans l'ensemble, assez faible, les églises du centre de Châtellerault étant souvent préférées par les futurs époux.)

Imaginez  le curé de St- Pierre aux Liens procédant presque tous les jours à la mise en terre d'un de ses fidèles et devant se plier à cet acte pourtant essentiel, qui consiste à dire que tel enfant avait, lors de son décès, 16 mois, ou 20 mois, deux ans, quatre ans,  telle jeune fille 19ans, 24ans…

 

2) 1709 :        Comme Le Roy Ladurie  s'arrête aussi, évidemment, à ce terrible hiver 1709 -  que le météorologue allemand Christian Pfister considère comme le plus rude des hivers des 500 dernières années  -  on a aussitôt envie de savoir comment Antoigné a su résister à ce froid intense qui balaya la  France du nord au sud, en sept vagues successives, dont la plus catastrophique dura du 5 au 24 janvier 1709. Le duc de Saint Simon, dans ses mémoires affirme que le froid fut, cet hiver, "au-delà de tout souvenir". Tout s'était arrêté dans Paris où les copistes devaient renoncer à écrire car leur encre gelait.  La Princesse  Palatine alla même jusqu'à déclarer qu'il mourut 24000 personnes à Paris entre le 5 janvier et le 2 février 1709 !

         Toute la nature souffrit de ce terrible hiver: les grains se ressentirent de ce froid, une grande quantité d'oiseaux et de lièvres  furent trouvés morts dans la campagne, les rivières étaient gelées et, comme les moulins ne pouvaient plus tourner, le pain commença à manquer partout.           

        Que devenait Antoigné dans ces moments épouvantables? Combien de morts? Les registres de l'état  civil de la paroisse nous donnent des renseignements qui, comparés à ceux des années environnantes ne peuvent que nous surprendre.

Voici les chiffres que l'on peut trouver sur les registres des années 1708,1709 et 1710:

Années    nombre d'actes enregistrés   nombre d'actes enregistrés
Années 1708           nombre d'actes enregistrés 36       nombre de décès 13
Années  1709        nombre d'actes enregistrés 17     nombre de décès  9
Années 1710     nombre d'actes enregistrés  33     nombre de décès     20

        Voilà de quoi s'interroger! Pourquoi le nombre de décès enregistrés en 1709 est-il si bas? Faut-il croire qu'Antoigné, ayant  gardé le souvenir de 1693-94, se serait préparé pour ne pas supporter deux fois de suite la même catastrophe climatique?


Mais allons voir vers la fin du 18ème siècle:

 

1788 :

 

         L'année 1788 a été, elle aussi, une des plus mauvaises  de l'ancien régime: des pluies continuelles ont ruiné les récoltes; à peine ont-elles donné l'équivalent  des semences : pas de froment, mais plutôt de la baillarge, cette sorte d'orge médiocre  dont on fait un pain grossier! En décembre, le froid s'installe, la température descend jusqu'à – 18°, la plupart des arbres fruitiers gèlent. Début 1789, le dégel vient trop rapidement et cause des dégâts très importants à Châtellerault dont la flotte sur la Vienne, emportée par les glaçons; est presqu'entièrement détruite[1].

 La récolte de froment fut aussi mauvaise que celle de l'année précédente et l'on fit du pain avec le seigle.

Qu'en est-il pour Antoigné? Pour l'hiver 1788-89, l'état civil nous annonce 9 décès pour 2 baptêmes. On remarque surtout que 8  de ces décès concernent des personnes d'"environ" 60 ans ou plus, une seule personne étant déclarée décédée à 48 ans.

 

Antoigné a tenu bon !

 


[1] Cf. "Châtellerault d'hier à aujourd'hui" de Mme Yvette Maréchal

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Chronique Anonienne

La Dame des Aubus

L'Antonien qui connaît son église a certainement remarqué la présence, dans le transept gauche, dans la croisée du transept, la présence d'une pierre tombale en marbre noir comportant la curieuse épitaphe suivante :
" I SY GIS LE CORS D'E DAMOISELLE FRANCOYSE PREVOS AN SON VIVANT DAME DES AVBVS QVI DECEDA LE VIN SAINTIEME MAY 1632 - PRIEZ DIEU POUR SON NAME. "
La lecture de cette épitaphe nous conduit évidemment à plusieurs questions :
1°/Qui donc a rédigé cette inscription, dont le moins qu'on puisse dire est qu'elle ne témoigne pas, de la part de son auteur, d'une  connaissance appronfondie de l'orthographe ? Evidemment on ne saurait imputer les erreurs contenues dans ce texte à celui qui pris la peine de ciseler les caractères sur la pierre : cet artisan, dont évidemment le nom ne nous est pas parvenu, ne savait peut-être même pas écrire et n'aurait, en tout cas, jamais pris l'initiative de rédiger un texte pareil. Serait-ce le curé d'Antoigné ?
Les curés de l'époque usaient assurément plus du latin que du Français. leur connaissance de cette dernière langue était peut-être hasardeuse, phonétique et non grammaticale, ce qui pourrait suffire à expliquer -- et pardonner -- les fautes commises sur l'épitaphe, fautes qui, hélas, restent pour l'éternité. Comme les actes de l'Etat civil de Saint-Pierre-aux-Liens, conservés pour la période allant de 1604 à 1635, sont quasiment illisibles, on peut se demander si ce n'était pas une façon d'échapper aux critiques que les fautes de français, auraient pu soulever. Force nous est donc d'admettre que l'auteur du texte inscrit sur cette pierre tombale est le curé en personne. Il écrivait bien mal et se trompait parfois dans l'écriture de mots compliqués, tels que " vingt-cinquième" ou " priez pour son âme". Il ne faut donc pas s'étonner du style de cette épitaphe qui aurait, peut-être, été plus compréhensible, rédigée en latin ....! 
2°/ Etait il normal d'enterrer une personne, fût-elle noble, dans l'église ? On trouve effectivement, en fouillant les actes de l'état civil sous l'ancien régime, quelques mentions du genre ;"le...jour, mois, année).....a été enterré dans l'église;;;" Et quelques anciens antoniens pourraient vous parler des découvertes qu'ils faisaient, lorsqu'ils étaient enfants : ils leur arrivaient de se bagarrer devant l'église, sur la place Jean THENAULT, avec des fémurs ou des radius qu'ils dégottaient en grattant le sol et que les services municipaux n'avaient pas encore retirés ou enterrés.
3°/ La dame des Aubus était assurément d'une noblesse assez élevée et éminente à Antoigné pour obtenir un traitement particulier. Il resterait à connaître sa date de naissance ainsi que la date à laquelle elle est devenue - sans doute par son mariage - Dame des Aubus.
On sait que l'ordonnance de Villers Cotterêts, signée par François premier en août 1539, non seulement entérine la primauté du français sur le latin dans tous les actes officiels, mais aussi, ordonne la création de l'état civil  et prescrit notamment la tenue dans toutes les paroisses, de registres de baptêmes. Si donc on admet que cette dame n'est pas décédée à plus de quatre vingts ans, on devrait retrouver trace de son acte de baptême. Hélas ! les baptêmes enregistrés à  Saint-Pierre-aux-Liens d'Antoigné - et conservés - ne commencent qu'en 1604 : aucun nom se rapprochant de celui mentionné sur la pierre tombale n'y a été relevé.
Les recherches dans les paroisses voisines (Chatellerault ou Pouthumé) se sont également révélées vaines.
L'acte de mariage de cette demoiselle - le terme de "demoiselle" servait à l'époque, à désigner une roturière - avec le seigneur des Aubus n'a pu être retrouvé non plus, ni à Antoigné, ni dans aucunes des paroisses voisines.
Il faut en outre avouer que la lecture de ces actes manuscrits, d'une écriture souvent indéchiffrable et d'une orthographe assez proche de celle de l'épitaphe, n'a rien de réjouissant !
Il reste à consulter le dictionnaire des grandes familles du Poitou : on y apprend que le blason de cette famille est " d'Azur à trois bues d'argent ou d'or " ( le terme "BUES" signifiant vases à deux anses). Le premier nom cité est celui de Pierre des Aubus, chanoine de notre dame à Chatelllerault, qui devient seigneur de la terre des Aubus en 1398. Guillaume des Aubus, (le E précédent le S de la fin du nom a déjà disparu !) dont il a été question dans une précédente chronique est évidemment mentionné. La dernière personne évoquée dans ce dictionnaire est Annibal des Aubus, père d'une Jeanne qui fut mariée au seigneur de Bourneuf, vers 1600.
Plus rien après cette information !!!
Mais qui donc était vraiment cette dame des Aubus, décédée  le 25 mai 1632 ?....
C'était une Antonienne. C'est pourquoi on sait si peu de choses sur elle !

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Chronique Antonienne

Un Antonien victime d'un crime?

     Le 4 juin 1920, Gaston Berthelot, amant de la "Pierreuse" Léonie Michot, donne rendez-vous à neuf heures du soir, Avenue d'Antoigné, à son rival Daniel Jude, que Léonie lui préfère. Daniel arrive à l'heure convenue et demande à Gaston quelles sont ses intentions. Pour toute réponse, Berthelot l'abat d'un coup de révolver. Daniel, atteint au bas ventre, s'écroule, expirant, tandis que Berthelot s'enfuit. Le lendemain, ce dernier revient auprès de la Pierreuse et cherche à l'intimider avec son révolver. Mais, constatant que celle qu'il aime ne veut plus de lui, il décide de se rendre à la police.

            Le récit passionnant que nous a donné de cette aventure, avec son talent habituel, sur son site internet -"les crimes du lundi" – et dans la rubrique du même nom de la Nouvelle République, l'historien châtelleraudais Vincent Olivier - auteur, entre autres, des "grandes affaires judiciaires de la Vienne" (1)- nous incite à visiter le site internet des archives de la presse que le Bureau départemental des archives a récemment ouvert au public.

             Le journal " L'avenir de la Vienne " du 3 août 1920 nous donne l'exposé détaillé du procès aux assises de Poitiers ayant abouti à la condamnation de Gaston Berthelot aux travaux forcés à perpétuité..

            L'avenue D'Antoigné, direz-vous, qui porte aujourd'hui le nom d' "Avenue du maréchal Foch» ; ce n'est pas tout à fait Antoigné! Et les adresses des personnes impliquées dans ce drame ne sont pas mentionnées. Il semble bien pourtant que notre village soit concerné.il est assurément regrettable que les documents tenus à la disposition du public ne mentionnent pas l'adresse des personnes concernées par le meurtre dont il s'agit..Mais puisque le drame a eu lieu dans cette avenue, il n'est pas illogique de supposer que l'un des antagonistes, au moins, venait d'Antoigné.

          Serait-ce la Pierreuse ? Ce surnom ne viendrait-il pas de ce que Léonie Michot vivait du côté de nos carrières de pierre ? Hélas, non : il s'agit d'un mot ancien, désignant une fille de mauvaise vie, ce que la pauvre Léonie était devenue sous la domination de Gaston Berthelot, qui la brutalisait ! Une chanson d'Yvette Guilbert, du début du siècle, nous donne quelques indications sur la conduite d'une " Pierreuse" : pour plaire à son "jules", elle s'employait à aguicher le bourgeois; lorsque celui-ci semblait conquis et prêt à céder à ses avances, elle l'attirait dans un coin sombre, mais au dernier moment , elle appelait son amant qui surgissait très en colère, prenait le bourgeois au collet, l'accusait de vouloir déshonorer son épouse, le menaçait et lui faisait payer le prix de ce qu'il n'avait pas eu!

          Gaston Berthelot n'était pas un homme fréquentable : il était depuis peu sorti de prison et avait fait la connaissance de la jeune Léonie, dont, à force de brutalités, il devint l'amant et dont il retirait l’essentiel de ses revenus. Un aussi triste individu ne saurait être d'Antoigné! 

           On comprend que Léonie, lasse d'être battue, ait eu envie de confier son sort à un homme plus tendre, plus humain…Daniel Jude est là. C’est un Antonien !

           De fait, on trouve le nom de Daniel Jude, la victime, dans le tableau de recensement nominatif établi en 1901. Daniel Jude est alors âgé de 17 ans (ce qui lui donne en 1920, sensiblement le même âge que Gaston Berthelot). il habite au Portail Rouge, pensionnaire chez Monsieur Désiré Favart, et exerce le métier de "champignonniste". C'est, à n'en pas douter, l'homme que Léonie aime et celui que Gaston, fou de jalousie, tuera dans l'avenue d'Antoigné! Le procès de Berthelot aura lieu le 2 août 1920, à la Cour d'Assises de Poitiers. L'accusé, dont l'acte relève du crime passionnel, sauvera sa tête et sera condamné aux travaux forcés à perpétuité.

           Mais remarquons aussi que le recensement nominatif de 1901 attribue à Daniel Jude le métier de champignonniste. On relève, pour 1901, la présence de 7 "champignonnistes" à Antoigné; leur patron est le sieur Bournac.

          La transformation des carrières de pierre en champignonnières a donc dû être entamée légèrement avant 1900. pour devenir pratiquement générale juste avant le début de la première guerre mondiale.

          Et puisqu'il reste quelque place ici, que diriez-vous d'une rapide comparaison du recensement de 1901 et de celui de 1851 évoqué dans la dernière chronique ? Eh ! bien, il apparait que la population de ce que l'on appelle "la campagne d'Antoigné" n'a que modérément évolué dans ces cinquante années : le nombre d'habitants a légèrement diminué (de 966 à 987) alors que le nombre d'habitations a augmenté (de 218 à 249). Le confort s'est-il amélioré ? Je vous parie qu'on vit bien à Antoigné ! Et comme les peuples heureux n'ont pas d'histoire, la presse locale, que les Archives départementales nous permettent désormais de consulter, de 1773 à 1940, n'en parle pratiquement jamais !

[1] Aux éditions "Geste éditions" – centre routier- 17 rue Norman-Borlaug   - 79260 La Crèche.*

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Chronique Antonienne

Recensement

   Les archives départementales nous offrent une réponse à cette question par la mise à la disposition du public des recensements effectués dans le département au cours du 19ème siècle :

            Le premier de ces recensements, concernant Châtellerault, date de 1851 et nous donne en quelques 435 pages une source infinie de renseignements. C'est que les recensements, à l'époque étaient faits avec un sérieux remarquable, d'autant plus remarquable qu'ils imposaient aux agents responsables d'aller de rue en rue, de maison en maison et de relever l'identité de chaque habitant, en indiquant leur âge, leurs liens de parenté éventuels, leur nationalité, leur profession, leur religion et même les maladies ou infirmités dont ils pouvaient être atteints!

            On apprend ainsi que Châtellerault comptait, en 1851, entre autres, 46 luthériens, 3 borgnes, 4 sourds et muets,…6 Anglais, 30 Belges et 2 polonais ! Mais on est bien obligé de se demander d'où viennent ces renseignements, alors que les pages sensées fournir ces données au regard de chaque personne recensée restent vierges ! En tout cas, Antoigné ne semble compter dans ses rangs ni étranger, ni luthérien, et, heureusement, ni borgne, ni sourd-muet ou amputé d'un membre, ni malade mental !

             La visite de chacune des pages du document ne manque pas de charme : elle donne, par exemple, l'occasion de s'étonner de l'ancien nom de certaines rues, et de leur orthographe . CHATELLERAULT en 1851 compte 20 quartiers ou ensembles. Un 21ème ensemble est constitué par la «population en bloc", à savoir, les militaires en caserne, les pensionnaires du collège, le couvent des sœurs blanches et la prison.

            Le 20ème ensemble va de la page 390 à la page 426 ; il est intitulé : "Campagne d'Antoigné". Cette campagne est très étendue, nettement plus vaste que celle de nos jours, intégrant de nombreux sites situés au sud de la route de la Roche-Posay qu'on n'ose plus considérer comme relevant d'Antoigné, tels que les Minimes, les Gats, la Renaitrie. Au reste, si l'on se réfère au plan du cadastre napoléonien mis à jour en 1833 - date à laquelle la voie ferrée n'existait pas encore - on trouve, au lieu et place du Pont du Malgarou, un site appelé "BARRIERE D'ANTOIGNE" avec octroi ! Pourquoi se cacher ? Nous sommes moins un quartier qu'une paroisse.

            Sur ces bases, le recenseur a trouvé, que la "Campagne d'Antoigné" possédait 218 maisons pour 271 ménages et 987 habitants, à savoir, 497 personnes du sexe masculin (dont 242 enfants, 239 mariés et 16 veufs) et 490 du sexe féminin (dont 226 enfants, 236 mariées et 28 veuves).

            Vous allez peut-être vous demander : comment 236 femmes mariées, 239 hommes mariés et 44 veufs et veuves arrivent-ils à constituer 271 ménages ? La réponse à cette question se trouve peut-être dans

           le fait que certains veufs ou veuves habitent chez leurs enfants et certains couples habitent chez leur père ou mère veufs !

            A ne considérer que ces chiffres, ramenés aux totaux de Châtellerault, il semble que l'on vive plutôt bien à Antoigné. En effet, sur la base des chiffres fournis (28 veufs ou veuves pour 987 habitants), Châtellerault ne devrait avoir que 532 veufs et veuves alors qu'elle en compte 782. !

            Mais le plus intéressant (quoique le plus difficile à exploiter) réside dans l'examen des professions exercées à Antoigné :

            Bien sûr, l'époque implique que les dames exerçant un métier sont peu nombreuses : on ne trouve que 8 lingères, 6 couturières, 1 brodeuse et 1 cabaretière.

            Chez les hommes, il semble que les rentiers propriétaires soient peu nombreux (moins d'une quinzaine) ; en revanche, le nombre de journaliers, de domestique, de jardiniers et laboureurs atteint le chiffre de 280, ce qui laisse penser que des enfants pratiquent ces métiers. Les personnes identifiées sous le nom de "carriers" ne sont que 22, mais il n'est pas exclu que certains travailleurs des carrières de pierre soient identifiés sous d'autres professions.

            C'est qu'il y a un nombre impressionnant de métiers, dont certains sont inattendus, voire, mystérieux ! On a, bien sûr :

  •  un curé, deux cabaretiers, quelques cantonniers, un charron, quatre maçons, deux menuisiers, un ébéniste, un employé, mais aussi :

  • 1 charpentier, 1 couturier, un avocat,

  • et … un farinier (!) un plafonneur(?) un plastiqueur [ou platisseur] (?)

             Gageons que certains de ces métiers ont été inscrits sur demande expresse des titulaires soucieux de bien définir leur activité et que le  "Recenseur", docile, s'est contenté de désigner sous le nom qu'on lui indiquait sans aller en vérifier l’exactitude !

             Signalons enfin la présence à Antoigné d'un chevalier (?) et d'un Maître de musique !

            Comment a évolué la population antonienne entre 1850et 1900 ? Cela pourra faire l'objet d'une future recherche.

 

 

Qui, à l'époque, s'appelle modestement : "chemin de Châtellerault à la Roche-Posay

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Chronique  Antonienne

Pour vivre heureux vivons caché

          1°/ Par un cartulaire de 1097, pierre II, évêque de Poitiers, confirme l'autorité  "évidente" de l'abbaye de Saint Cyprien de Poitiers sur les églises de Châtellerault ou à proximité de cette "place", à savoir : l'église Saint romain, l'église Saint Jean Baptiste et l'église Sainte Marie de Pouthumé ( qui a probablement disparu à la révolution). Il est bien précisé, bien que ces églises relèvent de l'église Saint Romain.

                Le cartulaire ajoute, in fine : "et ecclesiam de Antognec" ( et c'est comme si on entendait le rédacteur s'exclamer : "Ah! j'allais oublier : et l'église d'Antoigné, dont le nom m'échappe !).      ( car enfin si les autres églises s'appellent Saint romain, Saint jean Baptiste, Sainte Marie, qu'est-ce donc qui empêche l'église d'Antoigné d'être consacrée à un Saint ?)

           2°/ En application de la constitution de l'An III (22 août 1795), l'administration d'Antoigné est confiée à "l'administration municipale" du canton de Châtellerault. Cette transformation du statut de notre village n'est évoquée qu'incidemment au conseil municipal de la ville qui note, lors de sa séance du 10 nivose An IV (1er janvier 1796) que le rattachement des deux communes rurales d'Antoigné et Pouthumé impose la nomination d'un garde champêtre !

            3°/Le 18 novembre 1801, Antoigné perd définitivement son statut de commune et est officiellement rattaché à Chatellerault. Aucune mention de cette décision ne figure au registre des délibérations du conseil municipal.

                 En 1859, paraît l'histoire de châtelleraud et du châtelleraudais de l'abbé LALANNE. Il y évoque la présence, dans le chatellleraudais, aux premiers siècles de notre ère, de nombreuses villas romaines dont il précise le nom ; il ne cite pas la "villa Antonii" dont Antoigné tire son nom.

                  Quand madame Yvette Maréchal, dans son remarquable "Châtellerault d'hier à aujourd'hui " évoque la construction du pont Henri IV, elle omet de parler de l'apport d'Antoigné. Evoquant le rapport d'Androuet du Cerceau de 1611, elle souligne l'appréciation favorable de cet architecte sur les rues de Châtellerault, mais  ne dit rien de ce qu'il pense du chemin desservant Antoigné.

                 En 1902, un plan de Châtellerault est établi : sur ce plan, le chemin du Roc s'appelle : " chemin de grande communication  de Chatellerault à Antoigné et Oyré ". Il semble bien que ce soit la seule voie comportant dans chatellerault une telle appellation : on chercherait en vain la " rue de Châtellerault à Châteauneuf ou de Châtellerault à Pouthumé "...

                 Ce plan ne va pas au delà du Verger et de la Grisonnère.

                En 1930, un nouveau plan est réalisé : le chemin du roc s'appelle " chemin de Châtellerault à Oyré " et la rue de la grande Eau qui, dans le plan de 1902 s'appelait  "chemin vicinal ordinaire de Châtellerault à la Tour Girard " , est devenu "chemin vicinal ordinaire de Châtellerault à la Grisonnière ". Ce plan ne va pas au delà du verger et de la Grisonnière : Antoigné ne figure pas dans le plan de Châtellerault qui devrait, pourtant, concerner toute la ville.

                On ne s'étonnera donc pas que le plan des lieux réquisitionnés à Châtellerault en 1940, par les allemands ne contient aucune indication sur ce qui a pu arriver à Antoigné. Pourtant le Verger n'a probablement pas été le seul lieu exploité par les autorités : on sait aussi que les allemands ne pouvaient manquer d'utiliser les caves comme dépôts d'armes. Et l'on sait, que bien des Châtelleraudais ont trouvé dans nos champignonnières un abri très apprécié lors des bombardements.

              Ne faut-il pas conclure de ces constatations que notre village s'est, pendant longtemps efforcé de passer inaperçu, mettant ainsi en application le principe selon lequel les peuples heureux n'ont pas d'histoire ? 

Remise des lots
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